Healthy Skepticism Library item: 7575
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Publication type: news
Allard P.
Les prix des médicaments
Le Droit 2007 Jan 18
Full text:
Le ministre québécois de la Santé, Philippe Couillard, a tenté de rassurer un peu tout le monde hier matin en affirmant que d‘éventuelles hausses du prix des médicaments seraient liées et limitées à l’indice du coût de la vie. Les premiers reportages laissaient entendre que les hausses pourraient être plus importantes et que le régime public n’absorberait que la différence entre le prix actuel et l’indice d’inflation. Toute augmentation additionnelle – et certaines sociétés pharmaceutiques ne s’en seraient pas privées – aurait alors été facturée aux individus ou aux régimes d’assurance privés.
M. Couillard a cependant ouvert la porte à des exceptions, sans préciser, et il y a là matière à inquiétude. D’abord, de quels médicaments s’agirait-il ? Et de quel niveau d’augmentation des prix parle-t-on ? Aux õtats-Unis, où les prix ne sont pas réglementés, les compagnies pharmaceutiques ont commis et commettent encore d’horribles abus en imposant des prix qui n’ont rien à voir avec les coûts de recherche ou de production.
Une Américaine a découvert l’an dernier que son ordonnance de moutarde azotée, utilisée contre un type de lymphome, venait de passer en une semaine de 77 $ Ã 548 $. Ce médicament existant depuis 60 ans, on pouvait difficilement invoquer des investissements en recherche et développement. Une autre société a augmenté le prix d’un médicament contre le sida, mis en marché en 1996, de 54 $ Ã 265 $ par mois, sans justification. L‘émission La facture de Radio-Canada faisait état d’une situation semblable au Québec, où le prix d’un médicament breveté était passé de 220 $ Ã 770 $ tous les deux mois !
De toute évidence, le gel depuis 1994 des prix des médicaments reconnus par le régime d’assurance publique au Québec n’a pas trop fait souffrir les fabricants, qui continuent à engranger de généreux profits. À chaque année ils brevètent de nouveaux médicaments et à chaque année le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés, une agence fédérale, ouvre des enquêtes sur des prix jugés excessifs.
Une quinzaine d’enquêtes du genre ont été lancées en 2005, selon le dernier rapport disponible.
Tous reconnaissent au secteur pharmaceutique le droit d’obtenir un bon rendement financier. Dans un régime d‘économie privée, c’est la condition du succès. Mais ces entreprises ne doivent pas oublier que chez nous, au Québec et dans l’ensemble du Canada, la santé est devenue un droit auquel doit être assujetti, entre autres, le prix des médicaments, qui sont après tout défrayés par les citoyens – soit pas l’intermédiaire des régimes d’assurance publique, soit de leur poche.
Selon un reportage récent, les médicaments coûtent maintenant plus cher que les médecins, ce qui semble à prime abord un peu aberrant.
Les gouvernements provinciaux, et notamment celui du Québec, ont juridiction sur le secteur de la santé. Au Québec c’est 22 milliards $ par année pour le Trésor public. Les autorités publiques ont donc parfaitement droit – voire l’obligation – de contrôler le prix des médicaments, au nom des citoyens qu’elles représentent.
Si le ministre Couillard estime qu’il y a lieu de dégeler les prix et d’accorder une hausse correspondant à l’indice du coût de la vie et que le Trésor public est prêt à absorber la hausse, personne ne peut contester la légitimité du geste. L’opportunité peut-être, mais pas la légitimité. Il ne doit pas cependant, sous le couvert d’exceptions, donner un chèque en blanc aux sociétés pharmaceutiques.
Certaines en abuseront.