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Publication type: news
'Le facteur humain' : le marketing pharmaceutique prend les médecins par les tripes, dit Mansfield
Pharmacritique 2008 Aug 25
http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2008/08/25/le-facteur-humain-le-marketing-pharmaceutique-prend-les-med.html
Full text:
Il peut être choquant de parler du fait que la publicité et les visiteurs médicaux prennent les médecins par les affects, les sentiments, l’irrationnel, la dimension libidinale – bref, par les tripes. Nous en avons parlé ici et ici. Et pourtant, c’est quelque chose que l’industrie pharmaceutique connaît bien et exploite consciemment dans ses stratégies publicitaires. C’est ce que montrent aussi ces deux courts extraits des classiques du marketing pharmaceutique. Ils sont cités par Peter Mansfield – médecin australien qui a fondé le chien de garde anti-corruption en médecine Healthy Skepticism – dans une conférence donnée en septembre 2006 à Berlin.
Occasion de mentionner que la conférence faisait partie d’un colloque organisé pour fêter les 40 ans de la revue allemande indépendante Der Arzneimittelbrief (“La lettre du médicament”), à ne pas confondre avec notre référence habituelle: Arznei-Telegramm (“Télégramme du médicament”), jeunette qui aura 40 ans en 2009. Il est intéressant de voir que ce colloque, entièrement dédié à la dissection de l’influence de l’industrie pharmaceutique sur les médecins, a été co-organisé par l’ordre berlinois des médecins, en plus des revues médicales indépendantes. Comme quoi…
Les titres sont de Mansfield.
“Les médecins sont des humains comme les autres”
“Les professionnels de santé sont sujets au même type de stress et aux mêmes influences émotionnelles que les profanes. L’une des composantes de l’image d’eux-mêmes des médecins, c’est le sentiment fortement ancré d’être rationnels et logiques, particulièrement lorsqu’il s’agit du choix des médicaments. La publicité doit être un appel à cette image de raison, et en même temps un appel plus profond aux facteurs émotionnels qui influencent réellement les ventes”.
Smith MC. Principles of pharmaceutical marketing. Philadelphia: Lea & Febiger, 1968.
“Les firmes pharmaceutiques n’appliquent que les tactiques efficaces”
“En tant que publicitaire, je puis vous assurer qu’une publicité inefficace ne dure pas longtemps. Si l’expérience ne nous avait pas montré sans l’ombre d’un doute que l’immense majorité des médecins répondent superbement bien [splendidly] aux formes actuelles de publicité (pour les médicaments d’ordonnance), nous aurions très vite imaginé d’autres tactiques”.
Garai PR. Advertising and Promotion of Drugs [Publicité et promotion des médicaments]. In: Talalay P. Editor. Drugs in Our Society [Les médicaments dans notre société]. Baltimore: John Hopkins Press, 1964.
Et Mansfield commente d’ailleurs cet “appel aux désirs et aux peurs”, cette stratégie publicitaire consistant à “faire appel à nos désirs, par exemple aux désirs de pouvoir, de respect, de richesse, de simplicité, de sécurité ainsi qu’aux désirs sexuels” ou encore aux “peurs telles la peur de l’échec”. D’ailleurs, dans l’une des citations, il est question de la publicité qui doit interpeller non pas la raison, mais “l’image de raison” que les médecins ont d’eux-mêmes. Nuance essentielle…Plus les médecins pensent qu’ils échappent aux influences, qu’ils maîtrisent l’appel aux tripes, plus ils sont dans la “norme”, sous influence, mais encore plus vulnérables que ceux qui (re)connaissent leurs faiblesses, dit Mansfield. Etre sceptique, faire preuve d’un scepticisme sain (“healthy skepticism”), c’est aussi douter des certitudes que l’on a sur soi-même…
Il n’y a pas de lien direct et pas de résumé de cet exposé paru dans la revue Der Arzneimittelbrief, mais Mansfield a certainement repris ailleurs cette même argumentation. Et voici l’une des multiples illustrations de sa conférence, tirée d’un livre parlant du marketing pharmaceutique s’adressant aux médecins, les prenant par le “facteur humain”. Je suis sûre que les médecins apprécieront la classification et se hâteront de s’identifier à ces bêtes, l’une plus douée de raison que l’autre… Le “mouton conservateur” devrait constituer le gros des troupes, mais ce n’est qu’une spéculation de ma part.
Le Dodo est un oiseau disparu depuis 3 siècles, se caractérisant par son aspect informe et repoussant. Il est cloué à terre et incapable de voler. Au sens figuré, Dodo renvoie à un idiot, un attardé mental ou encore à quelqu’un d’obsolète, aux idées dépassées et anachroniques.
Le caring bunny : “caring” désigne en général les métier du social. Cela dit, l’association avec le lapin en fait aussi l’une des variantes du lapin de pâques, une créature un peu bizarre, mais prévenante, qui apporte des cadeaux aux enfants sages. A noter que c’est l’un des symboles les plus forts de fertilité et de fécondité. (Je ne comprends pas toutes les dimensions).
Le mouton conservateur se passe de commentaires ; grâce à son instinct grégaire, il suit le troupeau et ne change pas d’idées par lui-même. D’abord parce qu’il ne pense pas. Alors la critique…
Quant au loup entrepreneur / entreprenant aux dents longues, il n’y a pas non plus besoin de faire un dessin…
Tout en bas, les lettres GP signifient “general practitioners”: médecins généralistes. Ces animaux qui représentent le “facteur humain” sont dans un enclos – un jardin de la création taillé sur mesure, peut-être? – sur le portail duquel figurent les mots “health center” : centre médical.
Les interprétations restent ouvertes…